JDL Intelligence spécial "Génération Z et le Luxe" : le résumé
Publié le par Barbara Haddad
Le JDL Intelligence du mois de novembre, organisé en partenariat avec la Paris School of Luxury a fait un focus sur les jeunes consommateurs du Luxe, à l’occasion de la sortie de l’ouvrage "Génération Z et le Luxe", sous la direction d'Eric Briones. Résumé.
Gen Z : 7 tribus identifiées par le Lab Z de la Paris School of Luxury
C’est Pierre-Arthur Kalaijian, directeur fondateur de Paris School of Luxury qui commence en partageant une typologie de la Gen Z, qui se décompose en 7 profils :
- Les dupe addicts : passionnés du Luxe mais sans les moyens financiers, ils achètent des dupes pour vivre une expérience proche du luxe en utilisant des imitations abordables.
- Les entrepreneuses libres : jeunes femmes indépendantes, elles refusent les stéréotypes et recherchent des expériences uniques. Elles valorisent la liberté et l’authenticité, et inspirent d’autres femmes à devenir indépendantes. Elles cherchent à avoir un impact sur le monde.
- Les néo lupins : ces jeunes usent d’astuces pour accéder au luxe, défiant les normes et les codes traditionnels de manière audacieuse et stratégique. Ils sont en quête d’influence et de pouvoir et sont accros aux campagnes qui buzzent.
- Les fandom deluxe : ils sont passionnés par l’histoire des marques de Luxe et adoptent les codes de celles qu’ils affectionnent plus particulièrement. Ils en deviennent alors de véritables ambassadeurs, où le Luxe devient un symbole d’identité et d’appartenance.
- Les archivistes : gardiens de l’histoire et du patrimoine, ils cultivent un savoir approfondi pour certaines marques qu’ils partagent ensuite, auprès d’initiés. Ils ont un côté très élitiste.
- Les sages de la valeur : recherchent l’authenticité et la durabilité des produits. Le luxe devient un moyen de progrès social tout en maintenant des valeurs d’engagement et de frugalité. On parle d’éco-édonisme.
- Et enfin, les Mozart de la beauté : ils voient le maquillage comme un art, s’inspirant des réseaux sociaux et des stars pour perfectionner leur style. Ils sont en quête constante d’innovation et de créativité.
Comment comprendre et parler de la Gen Z ?
Au tour ensuite de Nicolas André, directeur du département Data Planning chez Epsilon, de partager d’autres insights issus des travaux réalisés au travers du Lab Z :
- La Gen Z fait exploser le "funnel marketing traditionnel" : le parcours d’achat est plus que jamais fragmenté et entrelacé d’un mix d’influence : réseaux sociaux, connexions physiques etc.
- Les médias sociaux sont devenus la principale source d’inspiration pour les achats de mode et de beauté : comment émerger alors face au flux incessant de stimulis et de contenus ?
- Les influenceurs jouent un rôle essentiel dans cette crise de l’attention et soutiennent la découverte de nouvelles tendances et de nouvelles marques.
- 50% de la Gen Z pensent que les algorithmes connaissent mieux leurs goûts que leurs parents … Ils leur font donc confiance pour dénicher la perle rare et trouver la bonne affaire.
- Bien que la Gen Z soit souvent considérée comme "digital native", 74% préfèrent les expériences d’achat physiques, IRL.
- La Gen Z est active sur les réseaux sociaux et effectue des recherches approfondies avant de faire des achats : face à un nouveau consommateur éclairé, bienvenue dans l’ère du marketing du consentement.
- La Gen Z recherche des marques axées sur la communauté, qui offrent plus que de simples produits et recherchent une connexion émotionnelle. Il est donc important de les impliquer, au travers notamment de la co-création.
- Les marques de Luxe ont un rôle à jouer face à l’impermanence constante pour favoriser une santé mentale équilibrée chez les jeunes : elles favorisent un sentiment d’appartenance à une communauté et peuvent participer de façon positive à la quête identitaire.
Gen Z : the bright Future of Luxury ?
Joëlle de Montgolfier, Executive Vice-President de Bain & Company partage, quant à elle, des chiffres qui soutiennent un possible "brillant avenir du Luxe", quand on regarde les habitudes prises par la Gen Z concernant la consommation de produits de Luxe :
- La Gen Z & Alpha va grossir trois fois plus vite que les autres générations d'ici 2030.
- En 2023, 20% des achats Luxe en première main étaient réalisés par la Gen Z (nés entre 1995 et 2010).
- La Gen Z achète du Luxe plus tôt que les générations précédentes : 15 ans en moyenne vs 18/20 ans pour les millenials.
- Les catégories d’entrée d'achat se sont inversées : préalablement, les Gen X et Y entraient dans la consommation de produit de Luxe par l’achat d’un sac à main ou de chaussures alors que la Gen Z rentre d’abord par les chaussures, et notamment par les sneakers, avant le sac de Luxe.
- Alors que le Luxe, auparavant, était très centré sur la vie professionnelle, il s’élargit, aujourd’hui, à la sphère personnelle, avec un certain phénomène de "casualisation".
Enfin, elle fait un focus sur la Gen Z dans deux pays :
- En Chine : où se sont encore beaucoup les parents qui soutiennent les achats Luxe des plus jeunes.
- Aux États-Unis, où règne un certain système de débrouille, et l’importance de cultiver l’indépendance financière.
Le triomphe du Black Luxury
"L’Afrique est certes un continent, mais plus que cela, elle est une culture qui transcende ses frontières. Elle prend alors la dénomination de "Culture Afro" (...) C’est surtout une Méta culture qui influence désormais la pop-culture et au final le luxe mondial à travers le concept de black luxury", commence en préambule Thomas Mondo, fondateur de l'agence Bel-Ami. Il rappelle ensuite :
- L’Afrique représentera près d’1 habitant sur 2 de la planète d’ici 2100.
- Tandis que déjà, depuis 2015, 2 pays africains trustent le top 10 des pays consommateurs de cognac (Afrique du Sud et Nigéria).
"L’économie africaine a donc quelque chose que les économies dites "matures" n’ont plus vraiment : des consommateurs optimistes, qui ont envie de dépenser", poursuit celui-ci.
Pour preuve, il parcourt ensuite plusieurs secteurs :
- La beauté avec l’ "A-beauty" : Fenty Beauty, Koba Skincare …
- La mode, de l’appropriation culturelle à l’inspiration jusqu’à la co-création et une proposition 100 % made in Africa : Maraz Origins, “Africa Instinct” au Printemps …
- L’hospitalité et la promotion de l’art de vivre Afro : Accor et sa campagne "Africa ALL ways on my mind" ou encore la Chef Eugénie Beziat qui disrupte la cuisine du Ritz Paris en créant une incroyable expérience métissée.
Gen Z question luxury !
Violaine Gressier, Global Head of Luxury de META, partage ensuite un focus sur la Gen Z et Instagram, véritable écrin du beau et de la créativité qui a, depuis sa création en 2010, attiré naturellement les passionnés du Luxe. Elle rappelle le positionnement d’Instagram, qui se veut à la croisée entre connexion sociale et entertainment et où il est possible de découvrir, chaque jour, des choses auxquelles on ne s’attendait pas.
Ainsi, 90% de la Gen Z se connectent tous les mois sur Instagram et 73% même tous les jours. Le format vidéo y joue un rôle de plus en plus important : les réels concentrent par exemple 50% du temps passé sur la plateforme. Des vidéos au format souvent très court, ce qui oblige les marques à changer leurs schémas narratifs.
D’autre part, la Gen Z est aussi une génération du “Why” : elle est sensible aux contenus qui ont du sens et qui valorisent des engagements éthiques, des pratiques durables et l’artisanat.
Ainsi, les plateformes sociales sont devenues le premier réflexe pour découvrir de nouveaux produits de luxe, devant le search. Il faut donc s’adapter à une Gen Z qui crée désormais son propre parcours d’achat, au gré de ses attentes et envies.
La positionalité : l’antidote au boycott Z
Claire Gallon, Partner The Salmon Consulting poursuit avec partage de 6 facteurs de risque pour les Maisons de Luxe, face à une Gen Z "qui fait peur" :
- Le diversity washing, qui consiste à projeter une image de diversité et de responsabilité sociale plus dans un but commercial qu’en faveur d’un changement réel.
- La cancel culture, lorsque des figures importantes des Maisons de Luxe tiennent des propos inadmissibles.
- L’appropriation culturelle, où une marque peut être accusée notamment de plagiat.
- Le green washing, quand l’argument écologique est utilisé de manière trompeuse, incomplète ou fausse.
- La rétribution juste, qui questionne le partage de la valeur dans un contexte de montée des prix des biens de luxe.
- Et, dans la même lignée, la géopolitique des marques.
(Source : Le Luxury Issue - Prosumer report 2024 Havas x BETC).
Il y a aussi des sensibilités locales plus exacerbées, comme aux États-Unis, où les sujets liés à l’inclusion et la diversité sociale sont récurrents. En Chine, force est de constater la montée en puissance des savoir-faire locaux, tandis qu’en Europe, le sentiment “anti-riche” gagne du terrain.
Des injonctions qui, pour les Maisons de Luxe, sont l’opportunité d’une réelle transformation, tout en restant en cohérence avec l’ADN de la marque. Le cabinet s’appuie alors sur le concept de "positionalité", pour accompagner les marques dans cette transformation et s’assurer que les méthodes de recherche ne soient pas biaisées par l’identité de la marque et son histoire. Trois étapes sont alors recommandées dans ce processus, de la compréhension des dynamiques mondiales et des spécificités locales au fait de trouver sa juste position, en légitimité avec l’ADN de la Maison.
Les archives pour mieux appréhender l’avenir des Maisons de Luxe
Enfin, coup de projecteur sur la revue Griffé, dont la particularité est de retracer, dans chaque numéro, l’histoire d’une maison au travers de l’humain : du fondateur ou de la fondatrice, mais aussi et surtout des collaborateurs et des différentes rencontres. Une démarche qui valorise la force du collectif et le travail d’équipe.
"Les archives ne sont pas quelque chose de poussiéreux et qui ne sert qu’à communiquer sur le passé. Elles doivent être prises en compte pour mieux appréhender l’avenir des Maisons de Luxe et constituent, dans ce sens, un atout majeur pour aborder la Gen Z", affirme Salomé Dudemaine, co-fondatrice de la revue Griffé.
Une revue destinée à celles et ceux qui travaillent dans le Luxe, les passionnés mais aussi les étudiants, qui découvrent par ce biais des parcours inspirants et des Maisons de Luxe au début, où l’histoire a souvent commencé avec peu de moyens, dans la débrouille …
Les deux premières revues ont été dédiées à Margiela puis Mugler et le prochain numéro, en précommande, retracera l’histoire de la Maison Kenzo.
Pour aller plus loin :
- Retrouvez l'interview du mois de Jean-Christophe Babin, CEO du Groupe Bvlgari.
- Vous pouvez également revoir le live : https://www.linkedin.com/events/7254463134646554625/?midToken=AQFwEE7f-axuFQ&midSig=0s0RJsGsTXTbs1&trk